Le français est une chance !
Pour nous toutes et nous tous qui avons choisi de nous rassembler au
sein de la Francophonie, le français, c’est en effet cette chance
insigne qui nous est offerte de pouvoir entrer en contact par-delà les
frontières et les océans, non pas seulement pour communiquer entre nous
avec l’assurance de nous comprendre, mais aussi et surtout pour agir
solidairement, pour réfléchir, ensemble, aux défis du présent et du
futur, pour partager nos craintes, nos espoirs et nos ambitions, dans la
détresse comme dans l’allégresse.
C’est la chance de pouvoir expérimenter, concrètement, à travers la
littérature, la chanson, les arts vivants, ce que la diversité des
expressions culturelles a de stimulant, d’enrichissant, de fécondant,
C’est la chance de pouvoir former des réseaux performants
d’universitaires, de chercheurs, d’experts, de professionnels, de
maires, de parlementaires, pour que le dialogue et la coopération au
service du développement durable ne relèvent plus de la décision des
seuls États, mais de l’engagement militant des peuples, de la société
civile, des citoyens,
C’est la chance de pouvoir confronter nos expériences et de
mutualiser nos expertises pour que prospère l’État de droit, pour que
s’enracine la culture de la démocratie et des droits de l’Homme, pour
que progresse la paix, tant au sein des nations que dans les relations
entre États,
C’est la chance de pouvoir nous concerter pour faire prévaloir les
intérêts de tous, et singulièrement de ceux que l’on a pris l’habitude
de ne plus entendre.
Alors en cette période de crises profondes et multiformes, de
mutations violentes et déstabilisatrices, en cette période où les liens
de solidarité tendent à se déliter au profit du chacun pour soi, en
cette période où grandit la tentation de stigmatiser ce qui nous
différencie les uns des autres au lieu de retourner aux sources de notre
humanité commune, en cette période où la détresse et l’indignation de
la jeunesse contre ce qui a été et ce qui est, ne suffisent pas à
concrétiser ce qui devrait être, ce qui pourrait être,
Savourons cette chance, non pas comme un acquis, mais comme un défi à
relever jour après jour, comme un puissant moyen d’action, comme un
formidable levier pour faire émerger une autre vision du monde et du
destin qui nous lie, une vision acceptable par tous, équitable pour
tous.
Cette chance, offrons-la surtout, en gage d’amitié et en signe de
ralliement, à toutes celles et tous ceux, toujours plus nombreux, qui
choisissent d’apprendre le français pour s’ouvrir au monde.
Abdou Diouf
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